Une visite de la Maison de Chateaubriand a permis aux participants de s’imprégner de son univers. Photo : © CD92/Olivier Ravoire
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COLLÉGIENS ET ÉCRIVAINS, À LA CROISÉE DES CHEMINS

Dans le cadre du Prix Chateaubriand des collégiens, une centaine d’élèves du territoire deviennent jurés littéraires. Les auteurs en lice sont allés à leur rencontre, pour ouvrir un dialogue et nourrir une curiosité réciproque.

Dos aux étagères accablées de livres, une classe de 3e fait cercle dans le carré de son centre de documentation. L’invité du jour, Gaël Bordet, ratisse sa tignasse romantique, puis balaie de ses yeux l’assemblée, avant de confier : « Pour moi, ce sont comme des retrouvailles avec le collège Sophie-Barat… À mon arrivée en France, je m’y étais fait de bons amis ». Surtout pétri des souvenirs de son enfance au Sénégal, l’auteur jeunesse revient sur ses pas, à Châtenay-Malabry, pour livrer les secrets de Djoliba, premier-né d’une trilogie. Roman « fleuve », si l’on peut dire, puisqu’il porte le nom d’un cours d’eau du défunt empire du Mali… Ce roman historique est la promesse d’un saut dans le temps, un précipité envoûtant d’animaux sauvages et de caravansérails, puisés dans les récits de voyageurs arabes de l’Afrique médiévale. Épousant les soubresauts d’une enquête policière, cette création singulière – « à sa sortie, unique roman francophone consacré à l’Afrique ancienne » – dut affronter la frilosité des maisons d’édition.

Un concours, pour transmettre le goût de la lecture

Son succès lui a néanmoins valu d’être sélectionné dans le cadre de la 3e édition du Prix Chateaubriand des collégiens doté de 1000 par le Département, avec Loup y es-tu ?, de Charlotte Bousquet. « La lecture de ces deux ouvrages a été proposée cette année à quatre établissements publics et privés du territoire, dans le cadre du dispositif départemental d’éducation culturelle et artistique Chemins des Arts, explique Blandine Leclerc, chargée des actions éducatives et de promotion à la Maison de Chateaubriand, organisatrice du Prix. Tous deux font écho, à leur manière, aux thèmes traités par Chateaubriand dans son œuvre, et peuvent avoir trait à un épisode de sa vie ». Par son aspect ludique, ce concours littéraire vise à transmettre à ses jeunes participants le goût de la lecture et de l’écriture. Reste que départager deux auteurs n’est pas tâche facile. Pour les y aider, plusieurs rencontres ont donc jalonné l’année scolaire des apprentis jurés littéraires. Une occasion saisie par Gaël Bordet, pour raconter ses pages blanches surmontées, ses trois années à se documenter ou son rêve de fouler – un beau jour – les villages de terre des Dogons, peuple des falaises maliennes et prochaine source d’inspiration.

Partageant l’idéalisme de Chateaubriand, Charlotte Bousquet a aussi goûté ces instants de rencontre : « Échanger avec les jeunes fait le sel de ces prix littéraires, auxquels j’ai l’habitude de prendre part. Surtout, je constate à travers eux l’avancée des causes pour lesquelles je me bats. C’est un ressourcement, une source d’espoir dans le monde qui se prépare ».

Revenus, rapidité d’écriture, inspirations littéraires… L’intervention était l’occasion de montrer tous les aspects du métier d’écrivain.© CD92/Olivier Ravoire
Dans son livre, Charlotte Bousquet explore la relation tumultueuse entre le loup et les éleveurs.© CD92/Julia Brechler

Source d’inspiration

« Personnellement, j’ai veillé à ce que l’échange soit à double sens, explique Gaël Bordet. Djoliba s’avère un ouvrage exigeant et j’étais impatient de savoir s’ils étaient parvenus à entrer dans l’histoire. » À écouter Camille, d’abord désarçonnée par l’éclectisme de son univers, l’auteur a brillamment réussi son intervention, en forme d’audition : « Maintenant, je perçois le livre différemment, cela m’a permis de mieux comprendre le choix du pays, la place centrale du fleuve ou la symbolique des lieux. » De manière improvisée, les collégiens ont déclamé en guise de conclusion des slams de leur composition, empreints d’inquiétudes sur l’urgence de choisir son destin, l’espoir d’une vie loin du besoin… Un puits d’inspiration pour l’auteur, qui en profite pour prendre le pouls de son lectorat. Adolescent tout nourri de Chateaubriand, Gaël Bordet se souvient du « mémorialiste incroyable » et de son repaire de la Vallée-aux-Loups, redécouvert récemment avec une classe du lycée Chateaubriand de Rome, participant au prix cette année : « C’est un lieu de ressourcement formidable, et le jardin où il a planté, soigné et chéri chaque arbre est exceptionnel. Les voir aujourd’hui plus que centenaires me plonge dans l’émotion et je compte bien y retourner ». Peut-être ce 30 mai, pour la remise du Prix… 

Nicolas Gomont

 
 
 

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