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Atelier d’avant-garde

La Fondation Arp, dans la maison-atelier des deux artistes, nous initie au mystère de l’Esprit d’atelier : Arp et Taeuber, vivre et créer. Jusqu’au 24 novembre.

Jean Arp (1886-1966) est Alsacien, Sophie Taeuber (1889-1943) Suisse alémanique, ils se rencontrent en 1915 à Zurich où il s’est exilé pour échapper à la mobilisation dans l’armée allemande. Ils constituent l’un de ces couples « iconiques » d’un XXe siècle d’avant-garde qui inventait l’abstraction, le constructivisme, le dadaïsme, Cabaret Voltaire et Bauhaus… Sur un pied d’égalité, ce qui est plutôt rare à l’époque, dans un jeu d’influences croisées et inextricables jusqu’à ce que la mort les sépare : jeune encore, réfugiée en Suisse avec son mari pendant l’Occupation, Sophie Taeuber meurt accidentellement en 1943. C’est elle qui a conçu en 1927 la maison-atelier où le couple va « vivre et créer » jusqu’en 1940. Devenue fondation d’artiste à la demande de Jean Arp, elle est dédiée à la protection de la collection et à la promotion de l’héritage culturel des deux créateurs qui ont partagé, physiquement et artistiquement, un « esprit d’atelier ». Autour de leurs œuvres majeures et de nombreuses esquisses et photographies, l’exposition entend répondre à la curiosité : « Quelles différences existent entre un atelier et une maison-atelier ? Et quelles subtilités s’ajoutent quand cette maison-atelier n’est pas celle d’un seul artiste mais celle d’un couple d’artistes ? » En parcourant les espaces de chacun, nous sommes invités à partager leur inimaginable train de vie, quand les convives s’appelaient Max Ernst, Tristan Tzara, Kurt Schwitters, Theo van Doesburg, Paul Éluard, Marcel Duchamp, Maurice Ravel…

Photo : © A. Rzepka. Droits Centre Pompidou MNAM

Harmonies toscanes

La Maison des Arts d’Antony met en regard les peintures de Giovanni Giannini et Violaine Hulné : De la Toscane à Paris jusqu’au 28 avril.

C’est, au programme des expositions de printemps, l’autre histoire de deux peintres, une histoire de couple comme nous en propose parfois l’histoire de l’art – il s’agit à Clamart de Jean Arp et Sophie Taeuber, à Antony de Giovanni Giannini et Violaine Hulné. Toutes choses égales par ailleurs, leurs influences respectives sur la grande marche de l’art n’étant pas du même ordre. Giovanni Giannini, né en 1930 à Prague, vit entre la Toscane et Paris où il a été, longtemps, passionnément, professeur à École nationale supérieure des Arts décoratifs, qui d’ailleurs l’avait auparavant formé. C’est là qu’il rencontre la jeune Violaine Hulné ; ils partageront une vie de peintres enracinée dans le territoire de l’illustration éditoriale : « Un territoire vaste, ou plutôt des territoires […] peut-on lire dans le catalogue. Parce qu’il s’agit, dans un tel enseignement, de toucher à tout en toute liberté, d’apprendre la base, toutes les bases aux étudiants. Ce qu’ils en feront, c’est à eux de le décider, de le choisir. » Mises en regard, leurs peintures suggèrent des correspondances et des harmonies – à lui les cités électriques et grotesques qui font penser à des carnavals à Venise ou en Bohême ; à elle les paysages cristallisés ou disloqués imaginés parfois dans les alentours de San Gimignano où le couple se retire l’hiver. « La peinture de Violaine n’est pas une continuation de la peinture de Giovanni, elle n’en est même pas le contrepoint. C’est l’expression de sa façon de vivre, toute personnelle, un environnement longuement partagé. »

Photo : © Herve Abbadie

2 km et l’infini

Avec le dessinateur Kevin Lucbert, tissus organiques, paysages poétiques et esprit d’enfance ne sont pas seulement des clichés. La matière qui affleure son papier ressemble à la trame serrée d’une tapisserie psychédélique. Elle ouvre sur de vertigineux paysages de science-fiction rouge, de banlieue bleue, d’illusion à la Escher ou de délire à la Philip K. Dick. Et c’est surtout avec l’esprit d’enfance qu’il faut compter : armé d’un stylo bille simple comme… cristal – dont la publicité vante les deux kilomètres d’écriture ininterrompus  Lucbert invente des mondes infinis faits de lignes ondulatoires, de hachures d’espace, de densité patiente. « Cet ailleurs n’a ni commencement ni fin, écrit Coline Deltreil, mais il crée (…) des échanges entre plusieurs dimensions, comme si, à travers leur approche, il nous était offert de devenir les explorateurs de ses lignes colorées, vagabonds de l’univers projeté. » Et cela nous ramène à cet âge rêvé où le gribouillage était promesse d’infini. De l’autre côté du miroir, à la Maison des Arts de Châtillon du 5 avril au 23 juin.

Photo : Le coursier. © Kevin Lucbert

Sculptures de saison

Les Hauts-de-Seine sont une terre de sculpture, avec ses domaines patrimoniaux historiques, ses ateliers d’artistes et ses œuvres monumentales implantées par le Département dans l’espace public, comme récemment Éther (Égalité) sur l’île Seguin et La Verticale au parc départemental André-Malraux. Avec près de 4 000 visiteurs chaque année, le Printemps de la sculpture – sixième édition du 30 mars au 7 avril – a fidélisé un public différent de celui des visiteurs de musée : moins connaisseur, il a la fraîcheur des jeunes pousses. Vingt-cinq partenaires répartis sur le territoire, d’Asnières à Châtenay-Malabry, invitent à la découverte de leur patrimoine sculpté, souvent par des chemins de traverse. Par exemple en dix excursions « vélo sculpture », sur des parcours sportifs en marche nordique et en randonnée le long des circuits du relais de la flamme olympique, ou dans un étonnant bus amphibie. La chasse (numérique) aux sculptures (physiques) par l’application Baludik est également ouverte !

Photo : La Verticale, au parc départemental André-Malraux. © CD92/Julia Brechler

Danse des fantômes

Depuis 25 ans, le Théâtre de Vanves programme le festival Artdanthé, célébrant « la diversité de la création chorégraphique française et internationale » à la fois hybride, joyeuse et indisciplinée. Pour cette 26e édition, du 9 au 23 mars, le festival ouvre la galerie du théâtre à une installation de l’artiste Guillaume Dégé : Sous les fantômes. Formé aux Langues O’ où il étudie le chinois, illustrateur pour la presse avant de se consacrer entièrement à son art, mais aussi collectionneur d’abécédaires et de gravures, professeur aux Arts Déco de Paris et aux Beaux-Arts de Xi’an en Chine, Guillaume Dégé est un praticien des formes étranges aux couleurs suaves, où se croisent – au sens presque génétique – l’oiseau, la plante et le rocher. Connaisseur de l’encyclopédie chinoise dite des « enseignements de la peinture du jardin grand comme un grain de moutarde », il révèle pour Artdanthé un paysage poétique, peuplé d’objets fantomatiques dont il ne conserve que la trace et « qui déplient la mémoire du monde ».

Photo : © Guillaume Dege

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