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AU COLLÈGE, DES JEUX VIDÉO MADE IN HAUTS-DE-SEINE

CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega

Depuis deux ans, les établissements scolaires du territoire participent à un concours de programmation informatique. Les équipes seront départagés lors du Festival du jeu vidéo et du numérique, organisé par le Département en avril prochain.

Elle n’est pas à dévorer, bien qu’elle soit à croquer ! Abandonnée à un monde hostile, une appétissante cacahuète doit lutter pour sa survie. Aussi insolite que savoureux, ce scénario de jeu vidéo est né dans l’esprit créatif d’Hyppolite, élève du collège Jean-Moulin de Chaville. « L’idée originale a germé toute seule, durant les grandes vacances, confie le collégien, scolarisé en 4e. Dans la vie, mon frère développe des applications divertissantes pour smartphone. À mon tour, j’avais envie de me lancer dans le codage d’un jeu. » Audacieuse, son initiative reçoit l’oreille attentive de son professeur de technologie, qui lui accorde son appui. Dès lors, il lève dans son établissement une petite armée de sept volontaires, désireux de se frotter à la programmation, au graphisme et au pilotage d’un projet aussi protéiforme que la création d’un jeu vidéo. « Tout commence par l’élaboration d’un scénario original, raconte David Perron, l’enseignant qui supervise la petite troupe de développeurs. Il s’agit de définir les règles du jeu, de camper les personnages, de plancher sur les décors sans oublier de tricoter un fil narratif, reliant les différents éléments. » À l’arrivée, leur création est vouée à animer une borne d’arcade de leur conception, pour distraire leurs camarades sur les temps de récréation.

Bob l’éponge

Un défi de taille est à relever : ses concepteurs vont devoir composer avec un public exigeant. Accroc à la nouveauté et accoutumée aux qualités graphiques des jeux du commerce, la catégorie des 11-15 ans s’avère dure à impressionner. Pas de quoi accabler Maël, proclamé designer en chef : « Nous avons prévu trois univers et plusieurs niveaux de difficulté, précise l’adolescent, qui connaît les trucs et astuces pour tenir un gamer en haleine. Le franchissement de chaque palier impliquera une récompense et le déblocage de nouvelles apparences ». Son héros – la fameuse graine d’arachide – multipliera ainsi les travestissements pour parer à toute lassitude du « client ». Tenue de ninja, costume de panda… Sur son ordinateur, Maël fait passer des essayages à son avatar. Gage de succès, une flopée de références à la pop culture devraient garnir sa hotte du Père Noël. À ce titre, Bob l’éponge figure en tête du panel. Pour remporter un maximum de points, les compétiteurs devront sortir la friandise convoitée de l’ornière. La tâche ne sera pas rendue facile : sans défense, elle est incapable de repousser les attaques des oiseaux voraces et autres ennemis à l’appétit insatiable. À l’image de l’antique plombier Mario, il faudra donc louvoyer entre les obstacles, pour se frayer un chemin jusqu’à la sortie. Dès lors, la cacahuète rescapée sera couronnée et gagnera le droit d’évoluer. Dessins de personnages, esquisses de décors, réalisations des textures… Tout l’univers visible du jeu se conçoit sur Piskel, un logiciel de graphisme en open source. Pour le volet programmation, les collégiens s’en remettent à Scratch, une plateforme dédiée et adaptée aux débutants. En fait, c’est un jeu de construction qui remplace les traditionnelles constellations de lignes de codage. « L’exercice consiste à emboîter des blocs d’instructions mathématiques, explique Hyppolite. Cela configure les mouvements et le positionnement de tous les éléments. » Pourvu que tout soit empilé dans le bon ordre…

Décors, personnages… La conception graphique du jeu se réalise en parallèle du codage informatique.© CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega
Avant d’assembler la borne d’arcade, les élèves chantournent les pièces dans du bois de récupération.© CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega

Jeux décisifs

En dehors de la salle de classe, il faut jongler avec les outils de communication pour achever le travail en commun. Grâce au partage d’écrans, les jeunes geeks affinent l’ergonomie du jeu et poursuivent depuis la maison la chasse aux bugs. Sans oublier de faire de précieuses sauvegardes de données… Tout reprendre à zéro compromettrait le respect des délais, alors qu’une échéance se rapproche. Car Hyppolite et les siens vont bientôt devoir livrer bataille et rivaliser d’ingéniosité pour se distinguer de la concurrence. Afin de créer une émulation, leur professeur les a en effet inscrits à une compétition aux visées pédagogiques : le concours Digital Games. Ce tournoi de création de jeux vidéo est organisé par le Département, soucieux de favoriser l’engagement personnel des jeunes et d’accroître leur culture numérique. À l’issue de la phase de conception du jeu, et de son pendant la borne d’arcade, il s’agira pour les 92 équipes en lice cette année de défendre leur réalisation devant un jury, réuni à l’occasion du Festival du jeu vidéo et du numérique des Hauts-de-Seine. Cet événement fédérateur s’emparera du Parc des Expositions de la Porte de Versailles les 21 et 22 avril prochains. Joueurs d’ esport, fabricant de consoles, écoles du jeu vidéo… Tout un écosystème y sera représenté. En marge des conférences et autres ateliers pédagogiques, cinq concours seront organisés, sur des thématiques aussi variées que la robotique, le cosplay, le showmatch et de fait, le codage. « Ces concours sont des événements dans l’événement, explique Farid Hamzi, chef des projets innovants au Département. La programmation informatique fait déjà partie intégrante des programmes scolaires. Le tournoi Digital Games valorise le travail déjà accompli, permet de lier les savoirs et de faire découvrir aux participants la richesse des métiers du numérique. » Au total, trois prix seront mis en jeu au terme de la compétition : le coup de cœur du jury, le trophée du meilleur jeu et le prix de la meilleure borne d’arcade. Déjà détenteur de ce dernier, le collège Jean-Moulin compte bien pouvoir compléter sa collection, à moins que tout ne « parte en cacahuète »…

Nicolas Gomont

 
 
 

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