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DEVENIR APPRENTI, UNE GARANTIE D’AVENIR

De futurs enseignants d'équitation en apprentissage au Haras départemental de Jardy. Photo : CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega

Sur le territoire, plus de 120 centres de formation proposent des cursus en apprentissage ou en alternance. Une voie d’excellence, que le Département veut encourager.

C’est une mélodie à quatre temps, qui rappelle le Paris des hippomobiles. S’annonçant en martelant ses fers contre l’asphalte gelé, une jument s’approche, perçant à son passage la brume matinale. Rafaela, c’est son nom, pénètre dans le Grand Manège, bientôt suivie de ses congénères aux patronymes romanesques : Alegra, Vegas, Cachemire, Volcano… Avec sa robe marron glacé, légèrement mouchetée, ce cheval fait partie du vaste cheptel du Haras départemental de Jardy, situé à l’Ouest de Marnes-la-Coquette. Ce matin-là, la cavalerie est mobilisée pour un cours d’équitation. Sous les poutres de la halle couverte – infrastructure bien utile par temps glacial – Aymerick, 19 ans, glisse ses bottes dans les étriers. « Pour moi et nombre de mes camarades, c’est la première fois que nous montons ces chevaux, raconte cet apprenti enseignant d’équitation. L’objectif de la séance vise à corriger leurs défauts et à tirer d’eux le maximum de performances ». Dans un froid pétrifiant – qui étrangement ragaillardit les équidés – c’est une caracole qui se forme autour de Sarah Briest, coordinatrice de la formation professionnelle au Haras. Dans le jargon professionnel, l’exercice figure sous le nom de « reprise de dressage » ou « optimisation » : « Ces chevaux viennent d’arriver dans la structure. À nous de parfaire leur dressage ! Les cavaliers font des tours avec l’animal et identifient ses problèmes, comme d’éventuelles raideurs, des points faibles… Moi j’épingle les erreurs des cavaliers et leur donne des pistes pour les corriger. » Nul hennissement rageur, nulle ruade ou cabriole. En dépit de quelques maladresses, les élèves de Sarah Briest contiennent sans mal la fougue de leurs poulains. Préparant le brevet professionnel d’enseignant d’équitation, ces amoureux du cheval ont choisi d’intégrer le Centre de formation d’apprentis (CFA) du Haras de Jardy pour transformer leur passion en métier. Trois cursus y sont proposés – une qualification d’animateur, un brevet d’enseignant et un diplôme d’entraîneur équestre – soit autant de perspectives de progression de carrière.

Soin, minutie, originalité… Une élève se prépare à l’épreuve du chignon, avant l’examen du brevet professionnel de coiffure. Un diplôme indispensable pour ouvrir son salon.© CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega
Reconnaissables à leurs chasubles bleues, les apprentis du Haras de Jardy apprennent en un à deux ans le métier d’animateur, de moniteur ou d’entraîneur équestres. Trois professions qui recrutent.© CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega

Combattre les préjugés

Une voie royale qui permet d’engranger des compétences dans un lieu réputé, tout en accumulant une précieuse expérience en entreprise. « Le modèle de l’alternance est capital dans notre milieu, explique Maïwenn, qui a choisi de se former à Jardy pour la diversité de son écurie, allant du poney à dresser à l’étalon de concours. Travailler en complément des cours nous permet de mettre la main à la pâte et de cerner les inconvénients du métier, pour mieux y parer. » C’est sans compter avec les exigences des employeurs, qui apprécient les recrues ayant déjà fait leurs preuves. Alternante dans un poney club, la jeune Maïwenn scinde ainsi sa semaine entre ses responsabilités de monitrice et ses cours au Haras. Là, elle bénéficie d’un enseignement transdisciplinaire, axé autour d’un tiercé socle : la maîtrise du cheval, la connaissance des pratiquants et la gestion d’entreprise. « Notre équipe oriente la formation autour de la diversité des activités équines, explique Sarah Briest. Un bon enseignant doit être polyvalent, connaître son animal, transmettre son savoir en s’adaptant à son public, tout étant capable d’assumer la direction d’un centre équestre. » Au rebours des préjugés, un CFA comme celui de Jardy peut donc conduire à l’exercice de métiers très qualifiés. Autre atout des formations en apprentissage, l’insertion professionnelle des jeunes frais émoulus est forte dans les secteurs en tension. L’équitation connaît d’ailleurs un âge d’or, depuis la crise sanitaire. Les adeptes d’activités tournées vers le bien-être et la nature ont fait grimper le nombre de licenciés en club. « Nos cursus aboutissent forcément à un emploi, puisque nous manquons aujourd’hui de moniteurs, d’enseignants et d’entraîneurs, souligne Sarah Briest. Au Haras, nous diplômons environ 70 personnes par an. 80 % d’entre elles sont embauchées par l’entreprise qui les a formées. »

Encouragés par le succès des barbers, de plus en plus d’hommes s’inscrivent en CAP coiffure, pour maîtriser les techniques de rasage et de soins de la barbe.© CD92/Stephanie Gutierrez-Ortega

Nouvelle plateforme

Reste que l’employabilité des apprentis est souvent inversement proportionnelle à leur facilité à trouver la formation qui leur convient. Même dans un milieu familial, où le bouche à oreille fonctionne à plein : « L’offre de CFA en équitation est certaine et le descriptif des formations parfois obscur, trop technique, juge la formatrice. Alors que trouver le cursus adapté à son niveau et à ses ambitions est essentiel, pour éviter tout découragement de l’élève ». Souvent ignorants des rouages de l’enseignement supérieur, les futurs apprentis se tournent d’instinct vers internet et son cortège d’informations éparses. Pour concentrer les renseignements utiles et améliorer les relations entre les jeunes à la recherche d’une alternance ou d’un apprentissage et les employeurs du territoire, le Département lance une nouvelle plateforme en ligne (voir encadré). Un outil accessible, à associer à des prospections de terrain et à des rencontres avec les formateurs, permettant de se faire une meilleure idée tant de la formation visée que du métier parfois idéalisé. Sensibiliser les nouvelles générations à tous les aspects d’une profession et lever les préjugés qui l’entourent… C’est l’ambition de Nathalie Gomez, directrice de l’Institut de formation et de perfectionnement aux métiers (IFPM), implanté à Nanterre. De ce centre de formation en apprentissage, 120 coiffeurs sortent diplômés chaque année. « Les clichés ont la vie dure, regrette-t-elle. Le CFA n’est pas réservé aux mauvais élèves. Désormais, on forme en France jusqu’en école d’ingénieur en apprentissage. Je pense qu’il y a des parcours de réussite partout, de l’artisan au docteur en médecine. »

Un troisième maillon

L’IFPM compte d’ailleurs présenter quatre de ses pépites au prochain concours de « Meilleur Apprenti de France ». Un moyen de valoriser l’enseignement local, en poussant les jeunes à se dépasser. « Il est assez difficile d’attirer de nouveaux élèves, note cependant la directrice. Il nous faut les convaincre en confortant nos atouts, en faisant de la pédagogie dans les collèges et en restant dynamiques sur les réseaux sociaux. » Indispensable sésame pour ouvrir un salon, le brevet professionnel de coiffure se prépare en alternance, à raison de trois jours en salon et deux à l’école de formation. Les coups de ciseaux s’affûtent sur tête à coiffer et « cobaye » humain ; généralement des volontaires issus de la famille. Des cours plus théoriques complètent l’emploi du temps des apprentis. « Mon goût pour la coiffure est né durant le confinement, raconte Alexandre, qui enchaînait alors les petits boulots après s’être perdu en faculté. J’ai décidé d’en faire mon métier. Au début, cela m’embêtait de rétrograder en niveau de diplôme, mais en fait, il ne faut pas se formaliser de cela. » Le plus souvent, les jeunes admissibles intègrent l’établissement avec un contrat d’alternance déjà en poche, fruit de leurs recherches personnelles. « Dans le cas contraire, on les accompagne au mieux, grâce à des sessions de coaching, qui enseignent la rédaction d’un CV, d’une lettre de motivation et font travailler sa posture en entretien », détaille Nathalie Gomez. Le troisième maillon de cette chaîne d’apprentissage ne doit pas non plus être négligé. « La formation des maîtres d’apprentissage est aussi fondamentale. La bonne expérience de l’apprenti dépend de son accueil dans le salon, des tâches qui lui sont confiées et de son suivi régulier. Le trio école – apprenti – salon est d’autant plus gagnant s’il s’instaure une relation de confiance entre tous ces acteurs. » 

Nicolas Gomont

 

Une plateforme et un forum

L’apprentissage, malgré sa progression sur le territoire national, souffre parfois d’un déficit d’image. Un mode d’acquisition des connaissances gagnant/gagnant que le Département veut promouvoir.

Le Département met en place une plateforme où les employeurs publics et privés, notamment les entreprises de proximité, peuvent déposer leurs offres, consultables par les écoles et centres de formation et par les futurs apprentis. Cette plateforme de mise en relation lancée en février « participera à l’insertion des jeunes et permettra d’aider les entreprises, notamment les artisans dans les secteurs en tension », explique Georges Siffredi, président du Département. L’apprentissage qui allie enseignement pratique et théorique a le vent en poupe.Depuis 2018, il a ainsi progressé de 57 % en Île-de-France et de 67 % sur le territoire alto-séquanais… Cependant, selon une étude menée par le Département, il continue à souffrir d’un déficit d’image auprès des jeunes, tandis que des freins existent du côté des plus petites entreprises. Le premier Forum de l’Apprentissage des Hauts-de-Seine, organisé le samedi 25 mars prochain sur le Toit de la Grande Arche de Paris La Défense, constituera ainsi un temps fort de la nouvelle stratégie départementale en permettant aux jeunes de 14 à 25 ans, aux écoles et centres de formation ainsi qu’aux employeurs privés et publics de se rencontrer sur des espaces dédiés. Des ateliers de conseil et d’orientation sont prévus et la diversité des métiers, en particulier en tension, sera mise en avant par l’entremise de casques virtuels ou encore de démonstrations.

apprentissage.hauts-de-seine.fr

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