Posté dans panorama

La ménagerie de verre

Le Petit Château de Sceaux expose les Fantaisies animales de Pierre Rosenberg, donateur de ses collections au futur musée du Grand Siècle

Ils s’appellent Napoleone Martinuzzi, Fulvio Bianconi, Luciano Gaspari, ils ont travaillé dans les ateliers des grandes familles de Venise – Venini, Seguso, Barovier – les plus anciens fondés à la fin du XIIIe siècle. Leurs œuvres ont été collectionnées par Pierre Rosenberg qui en a fait don au Département pour le musée du Grand Siècle. Seulement, ce ne sont ni des dessins au fusain ni des peintures au rouge de Venise – d’ailleurs ce Venise-là est en quelque sorte périphérique, une petite île dont le nom scintille immédiatement des mille sortilèges du verre : Murano. Preuve que le plaisir a toujours guidé les goûts de l’académicien, ancien président-directeur du Louvre, et qu’il ne rechigne pas à la fantaisie. Spécialiste internationalement reconnu de Poussin, Pierre Rosenberg s’est constitué une drôle de basse-cour en verre, 750 animaux dont le pavillon de préfiguration du musée du Grand Siècle expose, du 13 octobre au 31 mars, une centaine de pièces, des années trente aux années quatre-vingt-dix. Naviguant sur un modeste canal entre l’art et l’artisanat, les fantaisies animales sont venues sur le tard au collectionneur lors de séjours prolongés dans la Sérénissime : « Pour certains de ces objets, il ne s’agit même pas de décoration. J’ai bien conscience qu’on parle d’artisanat. D’ailleurs, si une pièce est trop chère, je préfère dans ce cas acheter un dessin. » N’empêche que les plus belles pièces ne déshonoreraient pas quelque luxueuse mostra d’arte, et l’on en connaît qui aimeraient bien en avoir sur leur bureau… 

Fantaîsie animales. Les verres de Murano de la donation Pierre Rosenberg
Photo : © Philippe Abergel

De l’autre côté du miroir

Avec la 15e édition de la Biennale d’Issy, au Musée français de la Carte à jouer, Le Rêve a ses raisons que notre raison est invitée à explorer du 13 septembre au 12 novembre.

Depuis 1995, date à laquelle la manifestation d’art contemporain Sud 92 s’est transformée en Biennale d’Issy, le rendez-vous se fait, d’édition en édition, une place dans le paysage culturel. Moins exposé à la lumière que les institutions du genre, souvent plus accessible au néophyte par le recours à une thématique lisible, l’esprit des lieux est au dialogue – somme toute assez classique, même si la vidéo ou la réalité virtuelle y prennent part – entre notre sensibilité immédiate et l’imaginaire essentiellement figuratif des artistes. Le thème de l’édition 2023 – Le Rêve a ses raisons – emprunte à « l’étoffe des songes » de Shakespeare : autant dire qu’il y est question de fantômes, de divagations, de pas de côté. « En explorant le rêve, résume Anne Malherbe, commissaire de l’exposition aux côtés de la présidente Sophie Deschamps-Causse, l’art a ce pouvoir de remettre en usage des symboles qui forment un langage commun et nous invite au partage de représentations collectives. Il nous appelle à la réconciliation avec l’étrangeté du monde. » Ainsi les photographies de Pascal Sentenac, avec leur personnage de voyageur à la Tati saisi d’un Léger égarement… Jamais trop inquiétant mais émouvant parfois, souvent drôle et toujours en décalage avec la réalité, le rêve de la biennale est tissé de 55 propositions d’artistes, dont celle du collectif de douze étudiants de l’Ensaama Olivier-de-Serres, un Passe rêve qui joue les passe-muraille. 

Photo : © Pascal Sentenac

L’homme de Rio

Le musée départemental Albert-Kahn poursuit jusqu’au 19 novembre à Boulogne – dans l’architecture aérienne de bois et de verre imaginée par Kengo Kuma – son voyage renouvelé au sein de ses collections. Après une grande exposition inaugurale consacrée aux origines et descendances des Archives de la Planète avec le tour du monde d’Albert Kahn en 1908 et 1909, la seconde – Rio – Buenos Aires 1909 : modernités sud-américaines – éclaire un autre paysage des origines : celui du voyage en Amérique du Sud que le banquier effectue avec un photographe inconnu. L’exposition, à la thématique plus resserrée, est celle des premières fois : premières captations en couleur du Brésil et, probablement, de l’île de Madère ; premières autochromes au format 9×12 cm de la collection à être prises hors de France. Et d’une dernière : la carte du périple, à la manière de celles qui rythment les aventures d’Indiana Jones, trace le dernier voyage d’Albert Kahn loin des frontières européennes ; il laissera ensuite à ses opérateurs le soin d’aller fixer, pour la postérité, l’état du monde. 

Photo© Musée départemental Albert-Kahn, Département des Hauts-de-Seine

Le goût des autres

Pour la première exposition de sa nouvelle saison, du 15 septembre au 10 décembre, la Maison des Arts de Châtillon place sous le parrainage de Rimbaud ses cinq plasticiens invités à célébrer le fameux Je est un autre. L’exposition collective tend un « fil rouge » entre chaque artiste : leur grande curiosité et leur goût de l’autre. Dans les dessins de foule et de flux urbains d’Axel Roy, noirs sur vide, « la figure humaine domine et quasiment tout le reste disparaît ». Hervé Bourdin installe avec le sourire une mise en boîte (de conserve) pour 250 personnages, « qui, à trop vouloir se protéger, se rapetissent, s’amenuisent et s’excluent ». Ariane Kühl par ses dessins et Anne Bothuon, dans ses sculptures textiles, nous parlent de peaux et de corps ordinaires, de masques sans regard pour « rendre sa place à l’étranger en soi ». Quant à la technique virtuose de Marie Boralevi, appliquée comme du tatouage sur des portraits photographiques en voie d’effacement, elle combine le réel et l’artifice, la beauté de la belle et des bêtes.

Photo : © Marie Boralevi

Il était une fois la révolution…

Le Salon de Montrouge existe depuis 1955. À l’origine cantonné aux beaux-arts classiques, il s’ouvre très vite à toutes les tendances. C’est l’époque des Léger et des Lurçat, des Braque et des Bonnard. De décennie en décennie, chaque Salon dessine sa propre carte de l’art contemporain, au gré des sensibilités des commissaires d’exposition. Le XXIe siècle élargit la reconnaissance par les professionnels, les jeunes artistes y trouvent un accélérateur de carrière. Une petite révolution intervient la saison dernière – la suppression des traditionnels prix du Salon au profit d’un accompagnement autour de perspectives professionnelles – sous le commissariat artistique de Guillaume Désanges et Coline Davenne. Les deux têtes pensantes de Work Method poursuivent cette année leur projet « d’écosystème de l’art » avec la 67e édition : « transformer le Salon en vitrine de l’art de son temps, entrant en résonance avec l’actualité du monde de l’art et de la société. » 36 artistes ont été sélectionnés qui exposeront au Beffroi du 6 octobre au 29 novembre.

Photo : © DR

Les commentaires sont fermés.